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Telétravail 3/4 : les risques relevés par des managers de télétravailleurs

Impacts sur les relations dans l'équipe et le travail

Dans ce 3e article sur le télétravail (le premier portait sur les points d’appui et de vigilance avant la mise en place, le second sur les opportunités associées à la mise en place du télétravail), je poursuis ma synthèse des retours d’expérience de managers de télétravailleurs avec les risques liés à la mise en place du télétravail, en décrivant l’impact sur :

-          La relation entre le manager et le collaborateur,

-          Les relations dans l’équipe,

-          Le travail.

L’impact sur la relation entre le manager et le collaborateur

Le télétravailleur est par définition chez lui … Aussi une crainte relevée par un manager était le risque d’intrusion dans la vie privée ; il est en effet admis par tous que le fait de travailler chez soi génère une porosité plus importante entre la vie personnelle et la vie professionnelle  (sans que cela signifie que le salarié sera moins productif !). Par exemple lorsque les enfants rentrent de l’école, et que le télétravailleur fait une pause pour les accueillir, un appel du manager à ce moment-là pourra causer une gêne de part et d’autre.

Les autres risques relevés sont liés à l’éloignement physique du salarié.

Il est en premier lieu plus difficile de détecter si un agent ne va pas bien ; or cela fait partie du rôle du manager de détecter ces aléas, et d’engager la discussion avec le collaborateur si la situation dure. Or à distance, les signaux faibles sont plus difficilement détectés.

Ensuite les relations humaines sont faites d’échanges informels, d’humour, cela participe à l’entretien de la relation et en particulier de la confiance. En étant à distance, ces échanges informels sont bien moindres, voire quasi inexistants si l’on n’y prend pas garde, aussi le risque est de perdre cette relation de confiance entre manager et collaborateur.

Dans le même ordre d’idées, certaines décisions managériales entraînées par la situation de télétravail peuvent être mal comprises par le collaborateur : un manager expliquait qu’il était parfois amené à refuser un congé le vendredi lorsque le télétravail était le jeudi, car cela aurait éloigné le salarié trop longtemps du site et de l’équipe, et cette décision lui avait été parfois difficile à justifier.

L’impact sur les relations dans le groupe et le management d’équipe

Un des risques majeurs du télétravail s’il n’est pas mis en place avec mesure (en termes de durée du télétravail) est celui de l’isolement du télétravailleur par rapport au reste de l’équipe (cf. point de vigilance donné dans le 1er article, lorsque le collaborateur est déjà une personne qui est en retrait du groupe). La cohésion du groupe sera donc plus difficile à animer et à entretenir pour le manager.

De façon plus large, un collaborateur qui est moins présent sera potentiellement moins impliqué dans la vie de l’entreprise, connaîtra moins ce qui se passe au sein de celle-ci … La « perte de la culture d’entreprise » a été citée par un manager comme un risque associé au télétravail.

Enfin le manager risque de devoir faire face à la déception des collaborateurs n’ayant pas accès au télétravail ; en effet en fonction des accords d’entreprise certaines catégories de personnel peuvent se retrouver exclues du télétravail, comme les personnes en contrat à durée déterminée par exemple.

L’impact sur le travail et le management opérationnel

Impact sur la productivité

La situation de télétravail peut avoir des impacts sur le travail en lui-même, en premier lieu sur la productivité. Dans le 2d article nous avons vu que des managers relevaient une meilleure productivité, mais cela n’a rien de systématique. Les interruptions de tâches, si elles sont plus nombreuses en étant chez soi, peuvent affecter la productivité et la qualité du travail.

Celles-ci peuvent également être affectées par la différence de moyens techniques entre le site et la maison ; par exemple si aucune impression ou scan de documents n’est possible chez soi, le travail pourra prendre du retard, et le télétravailleur se retrouvera au retour sur site avec une liste de tâches à faire qu’il n’aura pas pu effectuer chez lui.

Le risque de perte de connaissances et de savoir-faire

Beaucoup de « petites » modifications passent par l’oral, même si elles font l’objet d’une note écrite, d’un mail, il n’est pas rare qu’un manager ou des collaborateurs échangent de vive voix en complément pour évoquer des mises à jour dans un logiciel, un changement de procédures … En étant éloigné, le collaborateur n’a que des écrits et risque ainsi de passer à côté de certains détails.

Plusieurs managers ont ainsi évoqué la peur d’oublier le télétravailleur dans la transmission d’une information, au point de devoir se mettre des petits rappels pour ne pas oublier la personne.

Enfin il y a un risque de perte du contact avec l’usager, si ces contacts sont moindres en situation de télétravail, par exemple si le choix a été fait de ne pas avoir de lien téléphonique avec l’usager lorsque l’on est chez soi.

Le soutien opérationnel moindre du manager

En ne voyant pas le collaborateur, le manager a plus de difficulté à comprendre ses difficultés à atteindre les objectifs ; une manager citait une collaboratrice qui n’arrivait pas bien à avancer, mais sans la voir travailler la manager ne pouvait pas comprendre pourquoi elle perdait du temps et ce qui la rendait moins efficace, et donc ne pouvait pas apporter le support qui l’aurait aidée.

Une manager a  indiqué que les difficultés d’un agent, qu’elles soient d’ordre professionnel ou plus personnel, étaient encore plus difficiles à détecter chez ceux pour qui « tout semble bien se passer », et envers qui elle reconnaissait être moins vigilante.