Les compétences relèvent-elles de capacités intrinsèques ou bien se développent-elles avec l'expérience ?
La psychologie du travail nous apporte des éclairages sur cette question.
Le premier modèle du développement des compétences : le modèle descendant
Ce modèle considère que les compétences peuvent se développer si le sujet dispose d’un certain nombre de ressources, ou aptitudes, à rechercher parmi :
- Les connaissances,
- Les aptitudes motrices et physiques,
- Les aptitudes cognitives,
- Les intérêts, la motivation
- Les traits de personnalité.
La principale limite de ce modèle identifiée par la suite, est l’absence de prise en compte du contexte de réalisation : le modèle présume que les conditions de réalisation importent peu tant que les ressources du sujet sont disponibles.
C’est en s’appuyant sur cette conception que des procédures de recrutement par exemple se centrent sur l’évaluation des connaissances, d’aptitudes transversales, estimant que leur maîtrise en situation de test est un gage de réussite en situation réelle.
Le modèle ascendant
Ce modèle permet de dépasser les limites pointées ci-dessous, et de considérer la compétence comme quelque chose :
- de dynamique, évolutif en fonction du temps et des situations rencontrées,
- de dépendant tant dans sa mobilisation que dans son développement, des situations dans lesquelles elle s’exerce. Si la situation ne s’y prête pas, je ne saurai pas mobiliser mes compétences, ou encore j’aurai du mal à les développer et à en acquérir de nouvelles (on peut penser ici aux « postes placards »).
Dans cette conception, le rôle d’une part de l’action déployée par le sujet, et d’autre part de l’environnement de travail, sont fondamentaux. Les compétences apparaissent ici comme des savoirs- faire développés dans différentes situations (de travail ou autre).
Ce modèle met en revanche peu l’accent sur les aptitudes individuelles qui sous-tendent ces compétences.
Combinaison des deux modèles
La combinaison de ces deux modèles offre une approche pertinente, et permet dans un mouvement de va-et vient de faire le lien entre les ressources individuelles et les performances en situation, avec au cœur de ce mouvement, les compétences.
En effet « les compétences ne se construisent pas sans ressources, et des différences individuelles, relatives à la nature, à l’efficience ou à la disponibilité de ces ressources peuvent aboutir à des différences importantes dans les compétences développées et les performances obtenues, […] à conditions situationnelles et organisationnelles identiques. » (cf. biblio [1])
Dans le champ du maintien en emploi de personnes en situation de handicap (avec une RQTH notamment), cet aspect prend tout son sens. Il serait aberrant et même dangereux de ne pas prendre en compte précisément les ressources d’un travailleur en situation de handicap, sous couvert d’égalité de tous dans les compétences.
Et d’un autre côté, il faut rappeler que l’organisation du travail, dons l’entreprise, a un rôle majeur à jouer dans la définition de situations de travail qui permette à l’individu de mobiliser, maintenir et développer ses compétences dans l’action. Il me semble que ce n’est aujourd’hui pas la tendance dominante, car la tendance actuelle est de faire reposer sur l’individu la prise en charge du développement de ses compétences (incitation à l’auto formation, à la prise en main de son parcours …).
Bibliographie
Article rédigé à partir de l'article :
Loarer, E. (2004). Le développement des compétences chez l’adulte : modèle descendant et modèle ascendant. Extrait de l'ouvrage Modèles et méthodologies d’analyse des compétences – le double éclairage des pratiques et des recherches. Coordinateurs : Viollette Hajjar et Alain Baubion-Broye. Toulouse : Octarés.